* L'Institut Veolia Environnement est une association à but non lucratif créée en septembre 2001 par la Direction de Veolia Environnement, convaincue alors qu'une structure externe de prospective pourrait apporter des éclairages utiles sur les défis environnementaux à venir.
L'Institut participe à la réflexion portant sur les grandes tendances qui émergent à l'interface entre société et environnement. A ce titre, il entend aussi proposer une plate-forme de dialogue et d'échanges et agir comme un lien actif entre avec la communauté scientifique internationale, la société civile et le monde économique.
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Rapport n°1: "Développement urbain: les nouvelles contraintes"
Quelles relations entre ces évolutions et les métiers de Veolia Environnement?
- Daphné Boret
- Les transports Transports et densité urbaine
- La distribution d'eau potable
- L'assainissement
- La collecte et le traitement des déchets
- Les services énergétiques
- Une vision intégrée des services de Veolia Environnement
Vers de nouveaux modes de transports
Dans chaque cas, il faut par ailleurs s'intéresser aux aspects techniques qui doivent permettre une adaptation aux changements perçus dans les formes spatiales d'urbanisation, et aux aspects sociaux et sociologiques qui caractérisent les changements de mentalités et d'attentes de la part du consommateur.
Les transports
Dans toutes les situations observées, l'urbanisation des nouveaux espaces est réalisable grâce à l'utilisation quotidienne de la voiture individuelle. Dans les pays en développement, ce sont les plus aisés qui partent d'un centre-ville très dense pour s'installer dans une banlieue plus aérée, mais où la voiture est indispensable pour les trajets quotidiens. En Europe, les familles modestes peuvent accéder à la propriété, et en particulier à la maison individuelle, sur des terrains en zone périurbaine car le foncier y est moins cher, alors que la possession d'une voiture est largement banalisée. Même dans les pays anciennement communistes, alors que l'habitat collectif représentait positivement le caractère citadin, la datcha en périphérie de la grande ville et accessible en voiture prend une place de plus en plus importante, et on peut s'interroger sur un possible changement des modes de vie. Enfin aux Etats-Unis, près de 90% des trajets domicile-travail se font en voiture individuelle, ce pourcentage étant d'autant plus important que la ville est étalée et que sa densité est faible.
La densification urbaine, la maison individuelle, la propriété privée créent de nouvelles conditions géographiques auxquelles sont confrontés les gestionnaires des transports en commun. Ils doivent réussir à proposer une alternative crédible à la voiture particulière, en même temps qu'ils doivent s'efforcer de prendre en compte le plus possible les attentes de consommateurs potentiels de transport en commum.
Transports et densité urbaine
On connaît très bien les domaines de pertinence des différents modes de transport en commun en fonction de la densité d'activité humaine, ou DAH. Celle-ci est un indicateur sociologique qui se définit comme la somme, sur une surface donnée, de la population et des emplois qu'elle héberge, et divisée par ladite surface. Cette densité varie par exemple de 1200 dans les zones les plus denses de Paris, à 20 dans les banlieues pavillonnaires à tissu lâche. Au-dessus d'une densité de 300, le métro ou le RER s'imposent. Entre 300 et 120, le tramway et le métro léger sont des bonnes solutions. En dessous de 120 on entre dans le domaine du bus, puis du minibus. Pour les densités les plus faibles qui sont justement celles rencontrées dans les banlieues pavillonnaires, il n'existe pas actuellement de mode de transport qui vienne concurrencer la voiture, et même dans les banlieues un peu plus denses, les bus sont mal perçus car ils contraignent l'usager en terme d'horaires et d'itinéraires.
Par ailleurs, l'autre principal problème rencontré dans ces quartiers est celui de la rupture de charge. Pour aller travailler en centre-ville, l'habitant d'une zone peu dense a souvent la possibilité soit de prendre sa voiture pour effectuer l'intégralité du trajet, soit de se rabattre en voiture ou en bus sur une gare routière ou ferroviaire proche. Il lui sera alors souvent nécessaire de changer de mode de transport pendant son trajet. Ce sont très souvent ces ruptures de charge, pour passer d'un mode à un autre, qui sont mal perçues par le voyageur. Elles sont synonymes d'attente, de fatigue, de perte de temps et d'inconfort.
Vers de nouveaux modes de transports
Pour concurrencer la voiture individuelle dans ces tissus urbains lâches, il faut donc prendre en compte ces deux aspects : il faut créer de nouveaux modes de transport viables économiquement en milieu dispersé, dont Créabus (1) est un premier exemple, mais il faut aussi proposer des solutions à la rupture de charge, de telle sorte que l'intermodalité soit une solution efficace et attractive pour l'individu, et pas uniquement avantageuse pour la collectivité. L'aménagement des zones de transit en zones de services est une première réponse dans le sens où des tâches quotidiennes peuvent y être effectuées, donc le sentiment de perte de temps y est atténué. Mais il faut réfléchir à d'autres solutions, car la demande de mobilité est en pleine croissance, et la dissociation des lieux d'habitation, de travail, de commerces et de loisirs, la diminution du temps de travail et l'augmentation de la demande de mobilité pour les activités de loisirs, la diminution des déplacements pendulaires, remettent en cause un système de transport rigide et de moins en moins adapté à nos sociétés.
Par ailleurs, dans la représentation collective, la voiture jouit d'une image très positive. Elle est associée à l'idée de liberté et elle a pris une place extraordinairement importante dans la vie de chaque famille, en particulier celle qui vit en zone périphérique. L'habitant de zone pavillonnaire ne pratique plus la marche à pied ni le vélo, et utilise sa voiture pour presque l'intégralité de ses déplacements, aussi minimes soient-ils. On a vu en effet qu'en Europe, un déplacement en voiture sur huit se faisait sur une distance de moins de 500 m ! La voiture est ainsi devenue un objet quotidien et individuel, personnel et personnalisable, un service gratuit car le conducteur ne sait pas évaluer le coût d'un trajet aussi court, une facilité.
De nouveaux services de transport en commun qui seraient capables de concurrencer la voiture ne doivent donc pas négliger les aspects de facilité d'utilisation et de confort, qui peuvent finalement faire basculer le choix de l'individu vers le transport en commun lorsque l'offre est conséquente. Sans un réel souci de prise en compte de ces aspects, la voiture individuelle aura toujours la préférence du voyageur.
(1) transport à la demande avec itinéraire modulable imaginé par Connex : le voyageur formule sa destination et son horaire.
La distribution d'eau potable
L'étalement des villes soulève le problème du coût des infrastructures nécessaires au développement d'une nouvelle zone urbanisée, en particulier dans le cas de zones peu denses. Dans le cas de l'approvisionnement en eau potable, il s'agit d'étirer des conduites à partir de centres de traitements. Il est par ailleurs considéré que pour une même quantité d'eau traitée, plusieurs petites exploitations décentralisées coûtent plus cher qu'une seule grande. Dans un souci d'adaptation aux nouvelles formes d'habitat, et en fonction des contextes, il est apparu envisageable dans certains pays de ne fournir qu'une eau de qualité moyenne, mais acceptable pour différents usages domestiques, à partir des stations de traitement, pour ensuite fournir un service individuel de purification améliorée en fonction de la qualité finale souhaitée.
Ceci correspondrait aussi à l'augmentation actuelle du désir de sécurité qui se manifeste à tous les niveaux. Une purification de l'eau à domicile la garantirait en effet de toute pollution extérieure, et constituerait un argument de vente supplémentaire pour tous les types de logement qui en seraient équipés.
L'assainissement
Dans les banlieues en développement, la dialectique entre assainissement collectif et assainissement individuel ou autonome dépend de la taille des parcelles, donc des densités d'habitation, et de l'éloignement des centres de traitement préexistants ou d'un exutoire naturel. Cependant, même avec des densités faibles, l'assainissement individuel n'est pas forcément une solution techniquement réalisable, alors que la collecte des eaux usées et leur envoi en station d'épuration nécessite de lourds investissements en infrastructures.
On peut alors s'interroger sur de nouvelles techniques à mettre en place en fonction du mode d'habitat. L'assainissement dissocié, qui consiste à collecter séparément nos déchets liquides et solides, à prévoir des circuits de collecte différents en fonction de la nature des eaux, enfin à produire sur place des produits recyclables, pourrait constituer l'une de ces solutions.
Ce système pourrait en effet être pertinent pour des habitations éloignées des réseaux de collecte et qui ne peuvent pas mettre en place un assainissement individuel, mais on pourrait aussi l'imaginer au niveau d'un immeuble collectif, dans lequel on aurait un système de récupération et de traitement in situ d'une partie des effluents. Il pourrait aussi être intéressant de favoriser ce système dans les métropoles des pays en développement, où la forte poussée de l'urbanisation ne permet pas de réaliser des installations d'assainissement adéquates. Créer ces systèmes de séparation et de recyclage in situ pourrait permettre de ne pas avoir à créer de très grandes stations d'épuration à l'extérieur des villes, évitant en même temps la construction de réseaux très étendus.
Ces techniques nécessiteraient en outre le développement de nouveaux métiers, tels que la maintenance et l'entretien d'installations complexes au niveau des habitations individuelles ou des immeubles collectifs.
Par ailleurs, certaines techniques très consommatrices d'espace, comme les bassins de retenue, peuvent contribuer à la production d'un cadre de vie agréable et enrichi au plan de la faune et de la flore, en cohérence avec le cadre de vie recherché par ceux qui migrent vers les périphéries lointaines.
La collecte et le traitement des déchets
L'étalement urbain est un facteur supplémentaire de coût pour la collecte des déchets, par l'allongement des trajets de collecte et du trajet vers l'exutoire final. On peut par exemple se demander si la collecte, le traitement et le recyclage des déchets ne seraient pas réalisables à l'échelle d'un groupe de logements, en associant par exemple à une mini-usine d'incinération un système de récupération de l'énergie pour alimenter un réseau de chauffage à l'échelle du lotissement. On peut penser que le syndrome NIMBY (Not In My Backyard) prévaudrait dans le cas de l'installation d'une unité de quartier en empêchant son installation. Cela dépendra cependant fortement des mentalités des populations et de leur degré d'appropriation de nouvelles techniques innovantes.
Plus globalement, il serait sans doute utile de réfléchir à la possibilité de concevoir des agglomérations composées de sous-ensembles (de sous-systèmes) dont chacun à son échelle (îlot, quartier, ville) serait équipé de façon à minimiser les consommations et les rejets.
Par ailleurs, un premier aspect du traitement des déchets individualisé est le compostage à domicile des déchets organiques, la maison individuelle entourée d'un jardin étant spécialement propice à cette technique. Cependant, il n'est pas encore certain que les ménages s'approprient cette technique, qui peut leur paraître compliquée. Un service de compostage à domicile des déchets organiques triés au niveau de l'habitation serait donc potentiellement un service à développer.
Les services énergétiques
Les réseaux urbains de chauffage sont très bien adaptés aux hautes densités des immeubles collectifs. Ils permettent par ailleurs d'utiliser des sources d'énergie difficilement utilisables autrement. Ainsi, le développement de l'habitat en maison individuelle peut à terme mettre en péril cette activité, en particulier dans les pays de l'Est où elle est fortement développée. Par ailleurs, à surface égale, on considère qu'une villa a une consommation énergétique triple de celle d'un appartement, en ce qui concerne le chauffage. Le marché de l'énergie pour la maison individuelle devrait donc être très important.
On pourrait par conséquent imaginer l'hypothèse d'une production décentralisée de l'énergie au plus près de l'utilisateur, soit par exemple par une pile à combustible, un système de chauffage par énergie solaire ou géothermique, etc., soit à partir d'une source d'énergie acheminée par un réseau, comme le gaz. Cela permettrait de ne pas créer de réseau d'alimentation des habitations en énergie, ou de n'en créer qu'un seul, au lieu de deux actuellement (un pour l'électricité et un autre pour une autre source d'énergie), ce qui réduirait considérablement les coûts des infrastructures. Une autre hypothèse consisterait à développer des réseaux de chauffage à partir d'une petite unité capable d'alimenter un quartier, donc adaptée à la structure du lotissement. Plusieurs unités fonctionnant avec différentes sources d'énergie et reliées entre elles pourraient ainsi permettre d'optimiser les coûts de la matière première en fonction de la conjoncture.
Il faut par ailleurs s'interroger sur les niveaux de densité acceptables à partir desquels il serait rentable de créer un réseau de chauffage. Le développement de mini-réseaux dont l'origine serait la centrale d'un bâtiment public, ou même celle d'un bâtiment tertiaire, et qui s'étendrait à un quartier environnant est en particulier intéressant. La création d'interactions entre les industries et le milieu avoisinant est aussi envisageable, mais plus aléatoire car les industries subissent la conjoncture économique à court terme.
Enfin, l'individualisation des modes de vie et donc des services étant une tendance générale, on peut s'attendre à trouver dans les immeubles collectifs une forte demande de facturation personnelle.
Dans tous les cas, il faut que la question de l'approvisionnement des habitations en énergie et plus spécifiquement en chauffage soit abordée très tôt dans le processus d'urbanisation, en particulier lorsqu'est décidée la construction de lotissements pour lesquels il serait peut-être envisageable de trouver des systèmes semi-collectifs.
Une vision intégrée des services de Veolia Environnement
Finalement, les logements, qui ont leurs propres flux d'eau, de déchets et d'énergie, semblent réellement des microcosmes de la ville. On pourrait envisager des habitations ou des groupes d'habitation qui utiliseraient des centres de production d'énergie décentralisés ou individualisés et recycleraient leurs eaux usées et leurs déchets organiques pour les utiliser sur place.
Les services rendus par Veolia Environnement au niveau de l'habitat dispersé vont donc évoluer, et ils pourraient par exemple se rapprocher de services de maintenance pour les différentes installations individuelles ou semi-collectives qui seront présentes au niveau de l'habitation ou au niveau d'un groupe de logements.
L'entreprise pourrait alors envisager une mutualisation de ses services dans les différentes activités. Des efforts de synergie au niveau de chaque pôle seraient alors nécessaires, comme cela a été le cas pour les services aux entreprises.
link para o relatório integral:
http://www.institut.veolia.org/fr/ressources/cahiers/16FF5YH37a8MuY5529pTeL82.pdf
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